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Extrait d‘un article de F.Hermanin écrit en 1905

GALLEGOS y ARNOSA (José)

Né à Xeres( Espagne), Ie 3 mai 1857.

Vit à Rome.


Une des plus intéressantes excursions que l’on puisse faire à Rome est la visite des ateliers de la Via Margutta, le vieux quartier des artistes: chaque maison, du rez-de-chaussée, où habitent des sculpteurs, jusqu’aux toits et aux terrasses en plein air, abrite une population pleine de vie et de gaieté. Cette visite est d’autant plus interessante que toutes sortes de nations s’y roncontrent et que chaque atelier est comme un coin de patrie où la décoration, les oeuvres d’art et les bibelots évoquent en cet éspace étroit le pays de l’artiste. Un des plus beaux et des plus caractéristiques par I ces ateliers est celui dont José Gallegos a su faire un cadre tel que peut en créer un artiste qui connait les multiples beautés de son pays a travers les siècles et sait en former un ensemble synthétique. A celui qui connaît les tableaux où Gallegos a retracé d’un pinceau habile les intérieurs des vénérables basiliques espagnoles et su exprimer tout le charme d’une religion mêlée à la fois d’austérité et de magnificence oriontale, ce merveilleux atelier semble on musée dans lequel l’artiste a réuni des objets d’art de tous les temps : ustensiles, armes, étoffes précieuses, auxquels sa fantaisie sait dans ses tableaux conférer une vie nouvelle. Cet amour des anciennes traditions hispano-arabos at de tout ce qui subsiste encore d’oriental dans les blanches cités où régna l’Islam lui est si particulier qu’il se manifeste même dans ses tableaux italians. Jusque dans la pénombre sacrée d’Assise, autour des sévères fresques romanes et gothiques, brillent comme des étincelles de la fantaisie mauresque.

La lumière qui pénetre dans les églises à travers les vitraux colorés, celle du plein soleil qui donne aux fleurs leur magnificence et qui baise les joues des filles au teint ambré, ce soleil sous l’éclat duquel étincellent les armes et se cabrent les chevaux écumants, il en fait son amour, le but de toutes ses créations artistiques. Dès ses plus jeunes années il se sentit puissamment attiré vers les pays où le soleil brille le plus vivement et c’est par un voyage d’études en Afrique qu’il commença sa carrière artistique.Né a Xérès de la Frontera en 1859, il réussit, après bien des luttes avec son père, à suivre sa vocation artistique et il entra à l’Académie des Beaux-Arts de Madrid dans l’atelier de Madrazo. Mais, plus encore que les cours de l’Académie, la libre nature l’attirait ; il cherchait, en de longues excursions, à en surprendre les beautés et aimait principalement à peindre en vive lumière animaux, hommes ou paysages. Sa Noce arabe au soleil, conservée au Musée national de Madrid, montre quelle était déjà l’éntendue de ses connaissances en ces années d’études. En méme temps il parcourait les vieux quartiers de Madrid à la recherche des anciennes maisons pittoresques, des petits jardins cachés, des types populaires intéressants. A Rome, où il arriva en 1880, il peignit encore pendant quelque temps des scènes orientales, telles que son célèbre Butin de guerre où l’on voit une sentinelle en armes, muette et sérieuse, gardant les belles esclaves conquises par son maître, reconstitution trés réussie de temps évanouis et qui témoigne de sa science de dessinateur. Depuis quelques années il s’est adonné presque exclusivement aux scenes de moeurs; à ce groupe appartiennent quelques délicats tableaux paints avec beaucoup de goût, représentant des intérieurs d’anciens palais romains, puis des compositions religieuses d’une couleur somptueuse parmi lesquelles il faut noter la série des Sacrements, où il a su évoquer toute la pompe des anciennes églises espagnoles, et des vues de processions, telles que la magnifique solennité de la Fête-Dieu à Venise, où il fait briller son cher soleil sur le groupe éclatant des enfants de choeur vêtus de blanc.

La tableau que nous reproduisons ici appartient a ceux que Gallegos paint plutôt pour sa propre satisfaction que pour le goût des amateurs. Les jeunes raccommodeuses de tapis sont assises dans le vestibule de la maison, et le soleil luit à travers la feuillage du jardin. C’est un de ces coins tranquilles comme l’artiste les aime, pour y observer en toute tranquillité le jeu des rayons d’or parmi les fleurs et la verdure. Depuis quelques années José Gallegos s’occupe aussi de sculpture, et le grand baldaquin d’autel qu’il a composé pour l’église Saint-Jacques de sa villa natale nous le montre sous son nouvel aspect. Mais le peintre se manifeste même dans cet ouvrage, où les arcades de marbre blanc de la coupole gothique at les robustes figures de saints en bronze qui l’accompagnent forment un ensemble pittoresque plein de couleur. F. HERMANIN,